Une entreprise qui veut se financer au sein du Marché Unique dispose d’une alternative : soit elle a recours aux marchés de capitaux, soit elle s’adresse à un établissement de crédit. Dans les deux cas, les règles gouvernant le financement seront presque exclusivement d’origine nationale.
Malgré l’intégration croissante du Marché Unique, le droit des Etats Membres continue à régir les transactions privées, y inclus celles qui servent au financement des entreprises. Mise à part les dispositions sur le crédit au consommateur (crédit à la consommation et crédit immobilier), l’Union européenne s’est généralement désintéressée des règles contractuelles de droit privé. Elle a été très active en matière de régulation des infrastructures, des opérateurs et des marchés pour protéger les investisseurs et prévenir les risques systémiques. Mais jusqu’à ce jour, elle a failli de soumettre des textes législatifs visant à harmoniser les règles qui régissent sur le fond les transactions de financement.
Cette lacune peut certes s’expliquer en raison de la répartition des compétences entre l’Union européenne et les Etats membres, en particulier eu égard aux principes de subsidiarité et de proportionnalité. Néanmoins, les conséquences sur le plan économique en sont néfastes. En l’absence de règles uniformes, les transactions transfrontières dans l’Union sont souvent régies par des lois nationales différentes, ce qui empêche tant l’établissement d’un marché véritablement européen que la réalisation d’économies d’échelle y afférentes. Dans le cas où un opérateur voudrait recourir à une loi unique pour mettre en œuvre une transaction financière sur tout ou partie du Marché Unique, il est souvent fait référence au droit d’un Etat tiers, comme le droit suisse ou anglais. Une bonne illustration en est le marché obligataire qui continue d’être concentré à Londres et risque d’être fragmenté entre les différents marchés nationaux après la fin de la période de transition. Un des obstacles principaux pour l’établissement d’un marché véritablement européen est en particulier l’absence de régime unique régissant les instruments d’un tel marché.
Au vu de ces lacunes, nous proposons des règles uniformes ayant vocation à régir les principaux types de financement, à savoir une obligation européenne, un prêt européen, un contrat européen de crédit-bail et un contrat européen d’affacturage. Il s’agit d’instruments optionnels qui peuvent être choisis par les parties. Dans le cas où l’un d’eux aurait été choisi, les règles européennes relatives à l’instrument choisi priment sur le droit national. Ce dernier reste cependant applicable en ce qui concerne des questions comme la capacité des parties ou le droit fiscal. Les instruments proposés devraient permettre aux entreprises de lever des fonds dans toute l’Union européenne, et ainsi de profiter d’une plus grande liquidité et solvabilité sur le Marché Unique. Dans un premier temps, ils peuvent également être utiles pour un espace économique franco-allemand.
Groupe de travail (par ordre alphabétique)
Arbeitsgruppe
Thierry Bonneau, professeur à l’Université Panthéon-Assas (Paris 2), expert auprès de l’Assemblée franco-allemande
Michèle Grégoire, professeur à l’Université libre de Bruxelles, codirecteur du groupe de travail
Matthias Lehman, professeur à l’Universität Wien, codirecteur du Groupe de travail, expert auprès de l’Assemblée franco-allemande
Anne-Claire Rouaud, professeur à l’Université Paris 1 (Panthéon-Sorbonne)
Iris Barsan, maître de conférences à l’Université Paris-Est Créteil (UPEC)